La loi Lagleize, du nom de son rapporteur Jean-Luc Lagleize, député de la Haute-Garonne, vise à faciliter l’accession à la propriété pour les ménages modestes et à encourager la construction de logements abordables. Cette loi, qui vient compléter d’autres dispositifs existants en matière de logement, a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 28 novembre 2019. Dans cet article, nous allons vous présenter les principaux aspects de cette loi et les impacts qu’elle pourrait avoir sur le marché immobilier français.
Contexte et objectifs de la loi Lagleize
Le constat est sans appel : l’écart entre les prix des logements et les revenus des ménages ne cesse de s’accroître depuis plusieurs décennies en France. Les prix des logements ont augmenté de manière continue depuis les années 1960, tandis que les revenus n’ont pas suivi cette évolution. Cela a conduit à une dégradation progressive de l’accessibilité financière des logements pour une partie importante de la population française.
Dans ce contexte, le gouvernement a souhaité mettre en place un dispositif législatif visant à favoriser l’accession à la propriété pour les ménages modestes et intermédiaires. La loi Lagleize a donc été élaborée avec pour objectifs principaux :
- de faciliter l’accession à la propriété pour les ménages aux revenus modestes et intermédiaires, en proposant un modèle alternatif à l’achat classique d’un logement ;
- de favoriser la construction de logements abordables, en incitant les acteurs du secteur à innover et à réduire les coûts de production ;
- d’améliorer la qualité du parc immobilier français, en encourageant la rénovation énergétique et la transition écologique.
Le principe du démembrement de propriété
Le dispositif central de la loi Lagleize repose sur le principe du démembrement de propriété. Concrètement, cela signifie que l’acquéreur d’un logement ne devient propriétaire que des murs (la « nue-propriété »), tandis que le terrain sur lequel est construit le logement reste la propriété d’un tiers (l’« usufruitier »).
Ce modèle, inspiré des pratiques en vigueur dans certains pays européens comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, permet de dissocier le coût du foncier de celui de la construction. Ainsi, l’acquéreur n’a pas à financer l’achat du terrain et peut donc accéder à la propriété pour un prix inférieur à celui d’une acquisition classique.
L’usufruitier, quant à lui, perçoit une redevance mensuelle versée par le nu-propriétaire. Ce dernier bénéficie néanmoins d’un droit d’usage et d’habitation du logement pendant toute la durée de l’usufruit, qui est généralement fixée à 99 ans.
Les organismes de foncier solidaire (OFS)
Pour mettre en œuvre ce dispositif de démembrement de propriété, la loi Lagleize prévoit la création d’organismes de foncier solidaire (OFS). Ces structures, à but non lucratif, auront pour mission d’acquérir et de gérer les terrains sur lesquels seront construits les logements concernés par le dispositif.
Les OFS pourront être créés par des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes privés à but non lucratif. Ils seront chargés d’attribuer les biens immobiliers en démembrement de propriété aux ménages éligibles, selon des critères définis par la loi et adaptés au contexte local.
Les avantages et limites du dispositif
Le principal avantage de la loi Lagleize réside dans sa capacité à rendre l’accession à la propriété plus abordable pour les ménages modestes et intermédiaires. En effet, selon une étude réalisée par l’Institut d’aménagement et d’urbanisme (IAU) d’Île-de-France, le coût du foncier représente en moyenne 40 % du prix total d’un logement en France.
Cependant, le dispositif présente également certaines limites. Tout d’abord, il ne permet pas aux acquéreurs de bénéficier de la totalité de la valeur du bien immobilier, puisqu’ils ne sont propriétaires que des murs. De plus, le montant de la redevance versée au titre de l’usufruit peut représenter un coût significatif pour les ménages concernés.
Le futur de la loi Lagleize
La loi Lagleize constitue une avancée majeure dans la lutte contre la crise du logement en France. Toutefois, il convient de rester prudent quant à son impact réel sur le marché immobilier et les conditions d’accès à la propriété.
En effet, le dispositif ne pourra fonctionner pleinement que si les acteurs concernés (collectivités territoriales, organismes HLM, promoteurs immobiliers) s’emparent véritablement du sujet et mettent en œuvre les outils nécessaires à sa réussite. Par ailleurs, il est encore trop tôt pour mesurer l’effet incitatif du dispositif sur la construction de logements abordables et la transition écologique.
Ainsi, si la loi Lagleize constitue une étape importante dans la réflexion sur l’accession à la propriété en France, elle ne saurait être considérée comme une solution miracle. D’autres mesures complémentaires seront sans doute nécessaires pour répondre pleinement aux enjeux actuels et futurs du marché immobilier français.